Ce poignant récit s¹ouvre sur un vol d¹étourneaux dont le murmure dans une langue secrète fait écho à toutes les migrations et surtout à celle d¹ai[u0308]eux, partis d¹un village d¹Inde en 1872 pour rejoindre l¹île Maurice. C¹est alors le début d¹une grande traversée de la mémoire, qui fait apparaître autant l¹histoire collective des engagés indiens que l¹histoire intime de la famille de Nathacha Appanah. Ces coolies venaient remplacer les esclaves noirs et étaient affublés d¹un numéro en arrivant à Port-Louis, premier signe d¹une terrible déshumanisation dont l¹autrice décrit avec précision chaque détail. Mais le centre du livre est un magnifique hommage à son grand-père, dont la beauté et le courage éclairent ces pages, lui qui travaillait comme son propre père dans les champs de canne, respectant les traditions hindoues mais se sentant avant tout mauricien. La grande délicatesse de Nathacha Appanah réside dans sa manière à la fois directe et pudique de raconter ses ancêtres mais aussi ses parents et sa propre enfance comme si la mémoire se délavait de génération en génération et que la responsabilité de l¹écrivain était de la sauver, de la protéger. Elle signe ici l¹un de ses plus beaux livres, essentiel.
